
FÉVRIER 1848, QUARTIER DES CAPUCINES. La foule est venue narguer, dans une atmosphère bon enfant, Guizot, le ministre déchu de Louis-Philippe. Un cordon de fantassins barre l’accès à sa rue. Soudain, c’est le drame, la fusillade. Combien de morts ? Des dizaines, cinquante, peut-être. Alors, partout, dans Paris, le tocsin répond à l’aboiement des fusils.
Jules Boisrenard est dans la foule. Il a assisté, horrifié, au massacre et il est entraîné dans le tourbillon des événements qui s’enchaînent, la fuite du roi, la proclamation de la république, l’empire… À l’euphorie de la liberté retrouvée succède la tristesse des jours sans pain. Adolescent, Jules rêvait de dominer Paris et de mettre la finance au service de la collectivité. Mais avant de devenir le bienfaiteur de l’humanité, il lui faut, d’abord, nourrir sa famille, sa femme, Éléonore, et leur enfant, Maurice.
PRINTEMPS 1866, RUE DE ROME. Jules Boisrenard s’est enrichi. Mais à quel prix ? L’empire est à son apogée. Napoléon III veut faire de Paris la plus belle ville du monde, pour accueillir l’Exposition internationale qui doit s’y tenir l’année suivante. Pour financer les grands travaux qu’il a entrepris, il faut de l’argent, beaucoup d’argent. C’est la fuite en avant. Une spéculation effrénée alimente les caisses. La seule règle à respecter : dépenser, dépenser en une nuit ce qu’on a gagné en trois mois. Au jeu, à l’opéra ou dans les bras d’une cocotte. Dépenser pour démontrer au monde entier l’insolente réussite du régime.
… car c’était cette folle loterie qui alimentait le chaudron bouillonnant de l’activité de la capitale et autorisait les banques à créer sans cesse plus d’argent.
Jules ne pense plus au bien-être de l’humanité. Il a fait fortune, et alors ? Tout le monde autour de lui a fait fortune ! Il n’y a qu’auprès de sa maîtresse et de sa fille, Eulalie, qu’il retrouve la fraîcheur des sentiments de sa jeunesse. Sa femme Éléonore ? Il la respecte, mais que voulez-vous… Et ne lui parlez pas de Maurice, un voyou !
Une seule ombre au tableau, il y a ce fichu chantier de la rue de Rome qui n’avance pas et qui pourrait bien le mener à la banqueroute. Il lui faut sans cesse recourir à de nouveaux expédients à la spirale des montages financiers jusqu’au vertige. Jusqu’à la chute ? Et jusqu’à la curée, car tout le monde se partage sa dépouille.
AVRIL 1867. Alors que s’ouvre l’Exposition universelle, Jules est désespéré, car il a entraîné dans sa chute sa femme, sa fille et surtout la jeune Pauline, la filleule de sa femme, victime de son propre fils. C’est alors qu’il retrouve Fernando, un ami d’enfance, Fernando qui rêvait d’être Robin des bois lorsque Jules se voyait en pape de la finance. Fernando l’exhorte à se ressaisir, mais comment le pourrait-il ?
Le Chaudron des Illusions, c’est le roman du Second Empire. Cet empire qui n’est, au fond, qu’un demi-empire, comme on dit du monde des cocottes qu’il est un demi-monde. Ambition, amitié, trahison, romance, déchéance, vengeance, tout se mêle dans ce roman-fleuve, un fleuve puissant qui vous entraîne depuis les premières années passées à Moulins par le héros, Jules, jusqu’à l’effondrement de l’empire en 1870.
C’est aussi un voyage dans le temps, dans le Paris de ce milieu du XIXe siècle, sur les barricades en février 1848, à la Bourse lors d’une séance mémorable, sur le chantier du percement de la rue de Rome, au café Gobillard, à la première de La Vie Parisienne, dans le salon d’une « grande horizontale », dans le parc de l’Exposition universelle…
Le Chaudron des Illusions est publié par MVO Éditions.
Avis & Chroniques
Jeune provincial, Jules Boisrenard monte à Paris alors que Louis-Philippe est encore sur le trône. Il va trouver un travail modeste dans une administration obscure et en sera chassé là la suite de manifestations anti gouvernementales auxquelles il n’a d’ailleurs pas participé. Sa chance va naître avec la rencontre d’un homme qui va l’introduire dans les milieux financiers…… Louis-Philippe a été détrôné et le prince président Louis-Napoléon devient empereur sous le nom de Napoléon III. Les travaux entrepris par Haussmann encouragent la spéculation immobilière et Jules Boisrenard va brasser des millions pour le compte des autres et d’enrichir lui-même. Mais la roche tarpéienne est proche du Capitole et notre héros va se retrouver plongé dans LE CHAUDON DES ILLUSIONS. Adieu les soirées au théâtre, la fréquentation des demi mondaines dans les restaurants prestigieux. Un ami qu’il semblait oublié va venir lui proposer une vengeance à l’encontre de ceux qui ont utilisé sa naïveté.
Avec ce roman Hervé Drevred nous propose le portrait d’un personnage qui aurait pu figurer dans la Comédie Humaine de Balzac. Le Paris du Second Empire ressurgit sous nos yeux avec les musiques d’ Offenbach, les danseuses et théâtreuses entretenues par de riches protecteurs et des affairistes sans scrupules. Comme dans ses précédents romans, l’auteur donne des précisions historiques souvent méconnues sur la société de ce qui préfigure la Belle Époque. Un excellent moment de lecture.